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Analyse d'un tableau - la symbolique

Voici la signification de chaque détail incorporé au tableau intitulé Esse Quam Videri (terminé en août 2025).

Tableau dans son intégralité. (Cliquer sur l'image pour zoomer)

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Esse quam videri (Être plutôt que paraître): acrylique sur toile (50 cm x 61 cm)

Introduction:

  • La technique du trompe-l’œil est assez exigeante : elle demande non seulement une bonne maîtrise du dessin et des volumes mais aussi une grande précision dans le rendu des matières (bois, métal, papier déchiré, tissu, soie, voile, dorure).

  • Dans ce tableau, j'ai tenté de travailler plus particulièrement la diversité des textures (papier froissé, métal poli, velours, tulle, dorure).

  • Le trompe-l’œil ne se contente cependant pas de reproduire fidèlement.
    Il joue avec la perception et invite le spectateur à douter de ce qui est peint et de ce qui est réel.
    Cette mise en abîme rejoint l’idée même du carnaval et de ses masques : tout est vrai et faux à la fois.

1 - Le sujet principal: le carnaval de Venise

  • Le carnaval de Venise est un univers de métamorphose, de liberté et d’anonymat.
    Le masque permet de s’affranchir de l’identité sociale, de se libérer des contraintes hiérarchiques, et même de s’adonner à des jeux de séduction ou d’ironie.
    Mais il est aussi une métaphore de l’illusion et du double visage : ce que l’on montre n’est jamais ce que l’on est.

  • Dans le contexte de ce tableau, il devient une métaphore picturale : le masque et le trompe-l’œil participent tous deux au jeu de la dissimulation.

2 - Colombine

  • Ce personnage de la commedia del arte est vive, séduisante, fine d’esprit.
    Elle est souvent l’objet des désirs masculins.
    Elle incarne la séduction légère, la ruse et la liberté féminine.

     

  • Dans le carnaval, son masque est celui de la coquetterie, de l’esprit joueur, mais aussi du pouvoir féminin derrière une apparente fragilité.

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3 - Pantalon traçant le signe de l’hypocrisie

  • Pantalon est un personnage vénitien typique, représentant le vieil homme avare, souvent ridicule, trompé et dupé.
    Le fait qu’il dessine le symbole de l’hypocrisie souligne son rôle de figure morale inversée : il dénonce ce qu'il est lui-même.
    Il incarne les contradictions humaines : moraliser tout en étant lui-même victime de ses faiblesses.

     

4 - Le porte-clé masque de Venise

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  • Le porte-clé de laiton suspendu est un objet banal.
    Mais, en forme de masque, il devient un souvenir miniature du carnaval.
     

  • Le fait qu’il soit peint en trompe-l’œil renforce l’ambiguïté : est-ce un objet réel accroché sur la toile ou une simple illusion ?
     

  • Il symbolise aussi la capture du paraître dans un objet quotidien, comme si l’esprit du carnaval pouvait être réduit à un bibelot.
    C’est la banalisation de la fête et de l’illusion dans le réel.

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5 - Le calendrier de 2026

  • Un calendrier est un marqueur temporel, mais ici, il fige une image du carnaval.

    Or, le carnaval de Venise est par essence intemporel : il répète chaque année le même rituel.
     

  • En étant de 2026, le calendrier pointe vers le futur, mais un futur déjà prévisible et codifié.
    Le calendrier symbolise la répétition cyclique de l’illusion, l’éternel retour du masque.

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6 - La photo du couple masqué

  • Cette image illustre l’ambiguïté du carnaval : la séduction sans vérité.
    Deux êtres tentent de se séduire tout en gardant un masque, donc sans jamais se révéler.
     

  • C’est une métaphore des relations humaines : même dans l’intimité, nous gardons des masques sociaux, amoureux, psychologiques.

    Cette photo, insérée dans le trompe-l’œil, souligne la mise en scène permanente de soi.

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7 - La mouche posée sur le calendrier

  • La mouche est un détail réaliste mais symboliquement très riche : elle est le signe de la décomposition, de l’éphémère, du dérisoire.
    Elle vient troubler la beauté figée du calendrier, rappelant que le masque, si éclatant soit-il, n’échappe pas au temps et à la mort.
     

  • Dans une œuvre en trompe-l’œil, la mouche est un motif classique pour jouer avec la perception, mais aussi pour introduire une méditation sur la vanité des apparences.
     

  • La mouche peut aussi être le symbole de la persévérance, et il en a fallu pour terminer ce tableau. La mouche à elle seule demandant une 10aine d'heures de travail.

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8 - Signification de « Esse quam videri »

  • Cette devise latine signifie « Être plutôt que paraître ».
     

  • Placée dans un tableau qui ne représente que des illusions (trompe-l’œil, masques, photos déchirées, déguisements), elle prend une valeur ironique et critique.
    Le spectateur est invité à se demander : que reste-t-il d’authentique derrière ces apparences ?
    Le carnaval, les masques, le trompe-l’œil lui-même contredisent cette maxime : tout n’est ici que paraître sans être.

    Cela pourrait sans doute être le cœur du message philosophique de ce tableau.

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9 - Le poster déchiré

  • La déchirure, dévoiler l’envers:
    La déchirure introduit une rupture dans l’illusion.
    Elle révèle ce qui est « derrière » — ici, le panneau de bois brut — comme si l’on soulevait un rideau pour montrer la scène nue du théâtre.
    C’est une métaphore de la vérité cachée sous les artifices.
    Le bois, matière simple et authentique, contraste avec le raffinement du masque vénitien.
     

  • Les agrafes, fixité de l’illusion:
    Le fait que le poster soit agrafé signifie que même ce qui est faux est solidement fixé au réel.
    Cela rappelle combien les illusions sociales et culturelles sont fermement ancrées, difficiles à arracher.
    L’illusion s’accroche au monde, parfois plus solidement que la vérité.
     

  • Résonance avec la devise Esse quam videri:
    La déchirure illustre littéralement le passage du videri (le paraître - l’image imprimée du masque) à l’esse (l'être - la matière brute du bois).

    Mais le paradoxe demeure : ce panneau de bois est lui-même peint en trompe-l’œil.
    Ainsi, même la vérité supposée n'est encore qu'une illusion picturale.

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10 - Ma signature recouverte par un papier avec celle de Casanova

  • Dans une œuvre, la signature est un acte d’authenticité : elle rattache la peinture à son auteur véritable.
    Ici, je signe de mon nom, mais choisit de recouvrir cette signature par un papier de soie peint en trompe-l’œil, sur lequel apparaît une autre signature : celle de Casanova.
     

  • C’est un double jeu :
     

    • Disparition de l’auteur derrière un masque:
      Je me masque moi-même, effaçant mon identité au profit d’une autre, exactement comme le carnaval efface l’individu derrière son déguisement.

    • Casanova, figure de la séduction et du paraître:
      Giacomo Casanova est l’incarnation de la duplicité séduisante, du charme trompeur, de l’art de la mise en scène de soi.
      En lui “déléguant” la signature, c'est un peu comme si je  rattachais mon tableau à l’univers vénitien de la séduction, du mensonge et du masque.

    • Mise en abîme du trompe-l’œil:
      Ma signature est “réelle”, mais ce qui la recouvre est faux (puisque peint). Ainsi, le spectateur croit voir une superposition de papiers, alors qu’il n’y a qu’une toile peinte.
      Le but est que l’illusion atteigne ici son paroxysme : même l’acte d’authentification du tableau est mis en doute.

    • Résonance avec la devise Esse quam videri
      Là encore, le paradoxe s’impose : Être plutôt que paraître… mais la signature “authentique” est effacée au profit d’une identité de papier, fictive.
      Je tente ainsi de souligner la difficulté — voire l’impossibilité — d’“être” dans un monde dominé par l’illusion et le paraître.
       

  • En somme, cette signature recouverte est une prolongation conceptuelle du tableau : le peintre qui se déguise en Casanova, effaçant sa vérité derrière un rôle, tout en révélant au spectateur que la peinture, elle aussi, est un masque.

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11 - Le lien entre masques et trompe-l’œil

  • Le masque cache l’identité, le trompe-l’œil cache la réalité de la peinture.
    Dans les deux cas, le spectateur est trompé.
    Le tableau met ainsi en parallèle deux illusions :

    • celle du carnaval, qui cache l’humain derrière un masque,

    • celle de la peinture, qui cache le vrai derrière l’illusion.
       

  • Il serait tentant de faire le rapprochement avec la tableau de René Magritte, "La Trahison des images" où il montre une pipe avec une phrase en dessous indiquant "Ceci n'est pas une pipe".
    Comme Magritte le rappelle, une peinture n’est jamais la chose, mais sa représentation.
    De même, un masque n’est jamais l’être, mais son apparence.

    Mon tableau tente donc de jouer sur cette même dialectique entre être et paraître, réalité et illusion.

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Conclusion:

  • En résumé, j'ai essayé de ne pas me contenter de tenter un exercice virtuose de trompe-l’œil : j'ai mis en scène une réflexion qui se pourrait être philosophique sur l’illusion, le masque social, et la duplicité du monde.

    C’est une peinture qui dialogue à la fois avec l’histoire de l’art (vanités, trompe-l’œil, Magritte) et avec la symbolique profonde du carnaval vénitien.

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